Le coaching systémique d'organisations, un cas d'école
Coaching Systémique des Entreprises et Organisations: Géométries et Architectures d'Accompagnement

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Au delà du coaching individuel et du coaching d’équipe, cet article propose quelques réflexions supplémentaires sur une approche systémique du coaching d'entreprise et d’organisation.  Il est structuré autour d’une expérience de deux jours en accompagnement de plus de soixante-dix personnes comprenant le PDG, le comité de direction et plus de deux autres niveaux hiérarchiques d’une même entreprise. 

La description détaillée de cet événement fondateur pour l’organisation cliente a pour objet de présenter de façon simple et illustrée une pratique d’accompagnement systémique de grands groupes en coaching d'organisation. 

Pour l’entreprise cliente en pleine transition présentée dans ce cas, il s’agit d’un processus progressif de transformation centré sur des objectifs opérationnels dont le but est d’assurer la réussite mesurable voire la survie de l’organisation.  Pour le coach d’organisation, cette étude de cas met en scène quelques principes clés d’un accompagnement systémique à géométries variables que le coach peut proposer à un grand groupe afin faciliter des changements de perspective et les résultats qui les accompagnent. 

La  compétence détaillée au sein de ce texte repose sur un principe central à la pratique du coaching en général : le coach offre d’abord au client un espace de croissance au sein duquel ce dernier met en œuvre son propre cheminement vers son résultat escompté.  Il est tout de suite possible d’ajouter que le coach peut offrir  plusieurs espaces consécutifs de croissance en modifiant la géométrie du contexte d’apprentissage délégué. C’est cette technique appliquée à un grand groupe qui est présentée ci- dessous.

Par conséquent, ce texte se centre sur une compétence particulière du coaching. En plus de la compétence qui consiste à créer une relation de confiance, au delà d’une grande capacité d’écoute sans parler de l’art de savoir poser les bonnes questions le coach peut aussi utiliser l’environnement du coaching. En effet, le coaching individuel, d’équipe et d’organisations consiste aussi à savoir créer, modifier et modeler un espace de croissance en fonction de la démarche évolutive du client.  L’objet de ce texte est d’illustrer de façon très pratique l’art de concevoir des environnements d’apprentissage au bénéfice de grands groupes en général et afin d’accompagner des entreprises et organisations en particulier.

Plus particulièrement, cette présentation tente d’illustrer comment un coach systémique peut physiquement accompagner une organisation alors qu’elle pilote sa propre évolution.  L’art du coach consiste d‘abord à modifier de façon simple et subtile l’architecture implicite qui influence les interfaces opérationnels, puis à accompagner le travail du client en restant centré sur ses processus émergeants.

L’objectif de ce texte est aussi de donner :

  • Une perception pratique de la façon dont des coachs individuels et d’équipe peuvent élargir leur pratique vers du coaching systémique d'entreprise et d’organisation.
  • Une illustration de l’utilisation de quelques principes de coaching dans le but de créer et remodeler des environnement de croissance et d’apprentissage pour accompagner des transitions d’entreprise.
  • Une opportunité pour que les coachs d'entreprise et d’organisation puissent confronter leur pratique à celle d’un autre professionnel du métier.

LE CONTEXTE

Le comité de direction d’Oméga, une organisation de tourisme multinationale a précédemment participé à une session de trois jours de coaching d’équipe.  Suite aux résultats concluants de ce travail de développement de leur propre équipe, cette direction décide d’adresser les soixante-dix acteurs clés de leur siège international pour les préparer à soutenir une transition à la fois très importante et urgente pour assurer la survie de l’entreprise. 

Avec cette population et pour atteindre cet objectif, le comité de direction décide d’organiser un processus de coaching d’organisation de deux jours dans un lieu privilégié et résidentiel en province.

L’objectif :  L’objectif des deux jours de coaching d'organisation est de mobiliser les top soixante-dix managers clés.  Il s’agit de s’assurer de leur engagement pour concevoir et accompagner la mise en oeuvre des transformations opérationnelles urgentes d’abord à la survie d’Oméga, ensuite pour assurer la réussite et le développement durable de l'entreprise.

L’historique :  La situation est critique.  Moins d’un an plus tôt, les actionnaires avaient recruté le nouveau PDG pour qu’il transforme, remette sur ses rails et rende à nouveau rentable l’entreprise largement déficitaire.  Oméga n’aligne que des pertes depuis plusieurs années.

Le PDG précédent avait fait partie de l’organisation pendant des décades.  Il était le fils du dirigeant précédent, lui même un des pères fondateurs à l’origine de l’entreprise.  Bien entendu, quoique l’entreprise appartient à quelques grands actionnaires et de nombreux petits porteurs, elle fut toujours managée de façon très relationnelle voire familiale, dans un style foncièrement paternaliste.

D’une part Oméga jouis d’une satisfaction-client exceptionnelle, d’une très forte image et d’une marque mythique.  D’autre part, l’organisation souffre d’un type de management quasi féodal, d’un manque de processus formels, d’un syndicat puissant et défensif, de plusieurs clans historiques chacun défendant ses zones d’influences et intérêts à court terme.  Par conséquent, sur la dernière décade, l’entreprise était devenue un gouffre financier.

Le Challenge : La grande majorité du personnel rejette le principe même du changement.  Le nouveau PDG et tous les membres encore plus récents de son comité de direction sont perçus comme des implants technocratiques et ambitieux qui ne comprennent rien à la culture de l’organisation ni à son produit extraordinairement original.  Pour préserver l’intégrité de leur héritage historique, le personnel qui s’exprime haut et fort estime que c’est de leur devoir que de résister à toutes les propositions de la nouvelle équipe de direction.

En guise d’indicateur sur les douze mois précédents, plusieurs consultants recrutés pour accompagner la mise en oeuvre de processus plus professionnels et implanter des débuts de transformations s’étaient fait rejeter par un feu nourri de résistance active. 

Dans ce même esprit taquin, les coachs appelés pour accompagner les deux jours de coaching d’organisation sont accueillis avec des histoires d’horreur illustrant la façon dont leur prédécesseurs furent disqualifiés et virés.  Lors d’un échange anodin, un membre de l’organisation demande à l’un des coachs combien de temps il pense que ce contrat allait durer.  La scène est prête pour le déroulement du drame et les paris sont ouverts.

Par conséquent, dans ce contexte :

  • La situation offre très peu de marge de manœuvre voire aucune place pour un échec.  Si les coachs sont éjectés, voire si l’événement n’est pas une franche réussite, la nouvelle équipe de direction perd une bonne part de sa crédibilité.  Une telle éventualité aurait pour effet de considérablement renforcer la résistance au changement.  Le message au nouveau patron serait clairement « laissez tomber, nous sommes plus forts ».
  • Dans la mesure ou une approche de coaching d’organisation ne propose pas de changements de l’extérieur, mais ne fait qu’accompagner son émergence de l’intérieur de l’entreprise, une telle approche semble particulièrement indiquée.

Les Participants: Le groupe en présence pour l’action de coaching d’organisation comprend le PDG, le comité de direction d’une dizaine de membres presque tous d’une ancienneté de moins d’un an, et soixante managers de niveaux immédiatement subalternes issus des départements principaux d’Oméga : La comptabilité et les finances, Les ressources humaines, Le marketing et les ventes, la recherche et développement, les opérations, etc.

Le Lieu :  Une destination résidentielle et provinciale fournit une très grande salle capable d’accueillir les soixante-dix participants lors de réunions plénières plus une dizaine de salles plus petites pour accueillir des sous-groupes de travail.  Chaque pièce comprend des chaises, des tableaux à papier, pas de tables.

Les Coachs:  Quoiqu’un seul coach aurait pu suffire pour effectuer cet accompagnement sur deux jours, une équipe de trois assistant sont engagés

  • Afin d’offrir plusieurs cibles différenciées de boucs émissaires en cas de résistance active,
  • Afin de préparer des ressources utiles pour assurer un suivi à long terme et auprès du reste de l’organisation en cas de succès inconditionnel.

L’équipe de coachs a une expérience solide de travail en équipe et sont activement engagés dans un processus commun de supervision de leur pratique professionnelle au sein d’autres contrats indépendants et partagés.

LE PREMIER JOUR

L’événement est lancé lors d’une session plénière dans une large salle où les soixante dix participants ont choisis leurs sièges de façon libre.  L’architecture initiale de la salle est classique en forme de théâtre avec des chaises installées faces à une scène centrale où sont disposés quelques tableaux à papier.

Cet arrangement traditionnel à la façon d’une réunion de parents d’élèves peut laisser chacun des participants croire que le déroulement de l’événement consistera à faire défiler sur la scène des personnalités hiérarchiques et divers consultants choisis pour leur expertise.

Première Session Plénière

Dans ce cadre, le PDG livre en effet un court discours d’introduction.  Il remercie les participants pour leur présence, et demande personnellement à chacun de s’engager sans arrière pensées dans le processus qui va suivre.  Après un court descriptif du l’état financier critique de l’organisation, il expose de façon simple les objectifs des deux jours de coaching d’organisation : Travailler ensemble afin de préparer l’avenir en se centrant sur l’évolution du management, de la qualité, des résultats financiers afin d'assurer la croissance et le développement de l’entreprise à long terme.

Suite à l'introduction du PDG, il quitte le devant de la scène qui reste vide. Les quatre coachs positionnés à différents endroits dans la salle se présentent alors sans se déplacer vers le podium. 

Un des coachs demande ensuite aux participants de se regrouper au sein de leurs équipes départementales.  Les directeurs de départements et membres du comité de direction sont invités à se positionner en équipe distincte.   Le PDG qui est invité à occuper une chaise hors de tout groupe défini.

  • Note :  Dans ce type d’événement et à cette étape de constitution de groupes de travail, les participants proposent presque infailliblement que les sous-groupes soient constitués de façon à mélanger les départements afin de faciliter la rencontre interdépartementale et entre personnes qui ne se connaissent pas ou peu.

Cela se produit à cette étape comme prévu.  La proposition est repoussée par un coach qui clarifie que l’objectif de rencontre entre personnes qui se connaissent pas ou peu ne figure pas parmi les objectifs des deux jours.  Un deuxième coach souligne que des opportunités pour provoquer ces nouvelles relations apparaîtront naturellement pendant les pauses et repas pendant les deux jours.  Il propose aux participants de ne pas rater ces occasions de rencontres.

  • Note : A l’image de cet exemple et de façon générale, il est utile de s’assurer qu’un même coach n’intervienne pas plusieurs fois d’affilée, afin de modéliser une circularité dans la prise de parole, et afin d’éviter la mise en œuvre de polarités relationnelles entre le groupe et un des coachs.  De façon indirecte, cette modélisation dans la circularité d'interactions entre les coachs offre au client un modèle de communication inhabituel, souvent reproduit au sein de l'organisation cliente.

Pour conclure, chacune de ces équipes transversales, sans hiérarchique, est invitée à déplacer les chaises dans la salle de façon à se positionner face au centre de la salle qui se vide de tout occupant.

Suite au chaos provoqué par le repositionnement des soixante-dix personnes, une nouvelle configuration ou architecture de travail prend forme.  Il y a maintenant six groupes transversaux distinctement positionnés dans la salle, face au centre, plus le PDG, assis tout seul.

  • cinq départements, chacun sans son hiérarchique, qui a rejoint
  • le comité de direction qui
  • est sans son patron, assis de son côté.

La confusion due à la réorganisation de la salle plénière a pour effet de baisser la tension et désorienter les participants le temps de trouver de nouveaux repères.  Le changement de perspecives crée la surprise. Ceux qui s’étaient regroupés entre amis et se préparaient à poursuivre leur propre ordre du jour ou observer le déroulement d’une présentation se retrouvent subitement dans le cadre plus formel entourés par leur équipes quotidiennes. De fait, l’architecture implicite de la sale plénière se trouve totalement modifiée par le nouvel agencement:

  • Puisque les participants sont regroupés par équipe, cela fait resurgir l’existence d’entités départementales différenciées qui chacune manifeste une identité spécifique.
  • Par conséquent ces départements qui étaient noyés dans la foule deviennent des sujets présents en tant qu’entités collectives. Chacun d'entre eux apparaît comme un sous-système pertinent qui peut prendre une place et s’exprimer en tant que tel pendant le travail des deux jours.  
  • La division de la masse initiale des participants en groupes distinct avec leurs identités et responsabilités propres redirige et ajoute de la complexité à la polarité initiale entre la foule et le devant de la scène temporairement occupée par le PDG et laissée vide depuis.
  • Les membres du comité de direction assis ensemble donnent aussi corps et présence à cette entité qui jusque là n’apparaissant pas comme aussi présente.  Son identité et sa responsabilité propre prend sa place dans le système, sans toutefois être assimilées avec celles du PDG
  • Alors que chaque département est organisé en équipe  transversale, sans hiérarchique, cela vaut aussi pour le comité de direction qui par cette caractéristique structurelle commune devient une équipe "réseau" comme les autres dans la salle..
  • L’équipe de direction étant majoritairement constituée de membres récents apparaît aux autres comme un groupe qui manifeste une identité relativement moins solide, moins ancrée dans l’histoire de la société.
  • De même, le PDG assis tout seul peut sembler plus vulnérable.  Son identité est clairement différenciée de celle du reste du comité de direction.   

Dans cette nouvelle configuration, tous les participants assis au sein de leurs équipes habituelles font maintenant face au centre et à toutes les autres équipes.  L’ensemble de l’organisation se regarde plutôt que de regarder la scène. L’attention des participants n’est plus portée sur le même objectif qu’était la scène, mais se retrouve redirigée sur eux-mêmes.  Chaque participant et chaque équipe se trouve presque automatiquement en position d’acteur potentiel. La perception des nombreuses caractéristiques spécifiques à la complexité de l’organisation commence à être presque palpable.  

  • Note : Remarquez qu’il y a maintenant deux niveaux de transversalité dans la salle.  Six sous-groupes se font face sans qu’il n’apparaisse de hiérarchie dans leur positionnement respectif, et il n’existe pas de responsable hiérarchique dans aucun des sous-groupes.  

Cela illustre que la simple réorganisation physique de l’agencement d’une salle pour changer la perspective des occupants peut décentrer l’énergie et permettre des perceptions et interactions beaucoup plus complexes.  Cette stratégie systémique est un outil puissant au service de coachs d’organisations dans la mesure ou il n’intervient pas sur le contenu des interactions mais simplement sur l’architecture du potentiel des interactions.

Dans ce cas particulier, la modification de l’agencement de la réunion plénière permet un remodelage des interactions.  A partir d’une structure permettant une polarité entre la foule et la scène, le résultat est une géométrie plus complexe qui permet de multiples options de circularités transversales.

Les Sous-Commissions

Les équipes transversales sont installées.  Il est leur est d’abord demandé de s’organiser afin de travailler de façon efficace lorsqu’elles seront dispatchées dans leurs salles de sous-commission.  Plus spécifiquement, il est demandé à chacun des sous-groupes de produire trois volontaires qui assumeront des rôles de support de réunion afin d’aider leur équipe à se centrer sur ses objectifs et résultats :

  • Un faciliteur qui s’assurera que chacun des participants s’exprime, sans dominer les débats,
  • Un cadenceur qui affichera clairement à l’équipe le temps qui passe par rapport au temps imparti,
  • un scribe (autre que le faciliteur) qui écrira les commentaires du groupe sur le tableau à papier. 

Une description succincte de chaque rôle est donné sous forme écrite à chacun des volontaires, à lire aux autres participants dès leur arrivée dans leur salle de sous-commission. 

Les coachs précisent aussi qu’il y aura plusieurs occasions de travailler en sous-commissions, et que ces rôles seront assumés en rotation par les autres participants du même groupe par la suite.  De cette façon chacun pourra activement participer à assurer l’efficacité de son équipe lors des réunions ultérieures.

Premieres Consignes

Lors de ce premier travail, toutes les équipes reçoivent la même mission centrée sur les réponses aux mêmes questions.  Dans chaque équipe, il est demandé au scribe de recopier avec précision la formulation des consignes pour pouvoir s’y reporter lorsque les groupes seront dispatchés dans leurs salles de sous-commision.  

Chaque équipe doit répondre à la question suivante concernant chacune des autres équipes présente dans la salle :

  • Quelles actions spécifiques l’équipe X (chaque autre équipe dans la salle) devrait-elle mener à bien dans son champs de responsabilité et dans l’avenir immédiat afin de participer de façon conséquente aux résultats de l’organisation ? 
  • Remplissez au moins une feuille de papier-tableau par équipe.  Notez en entête de chaque feuille le nom de votre équipe puis le nom de l’équipe destinataire.

La deuxième partie de la consigne est de remplir une autre feuille de papier-tableau avec des items que l’équipe pense que les autres départements citerons la concernant. Cette question supplémentaire est la suivante :

  • Que pensez vous que les autres département diront sont les actions spécifiques dans votre champs de responsabilité que votre propre département devrait mener à bien dans l’avenir immédiat afin de participer de façon conséquente aux résultats de l’organisation ?
  • Remplissez au moins une feuille de papier-tableau.

Les coachs soulignent que les items sur les listes doivent être écrits de façon aussi complète et précise que possible.  Les commentaires doivent être compréhensibles par des personnes qui ne participent pas au travail des deux jours.  Il est aussi spécifié qu’il n’est pas indispensable que tous les membres d’une équipe soient d’accord sur tous les items proposés par l’équipe.  Il suffit dans un sous-groupe que quatre personnes soient d’accord sur la formulation d’un item pour que celui-ci puisse figurer sur la liste.

Un temps suffisant est négocié par les équipes pour mener à bien leur travail.  De façon humoristique et pour créer un esprit d’émulation, un des coach commente que la qualité des listes et la quantité d’items révèleront sans aucun doute la capacité de chaque équipe à travailler de façon efficace.

Après quelques questions de clarification, les équipes sont accompagnées dans leurs salles de travail en sous-commission.

  • Note : Les questions proposées ci-dessus reposent sur la préparation d’un travail relativement classique d’échange de perceptions croisées : 1) Que perçois-tu de l’autre ? et 2) que penses-tu que l’autre perçoit de toi ?  A cette occasion et en grand groupe,  il est proposé dans le cadre d'une stratégie systémique, afin de recentrer l’énergie préalablement verticalisée sur des interfaces horizontaux:  inter départements.

Premiers Travaux Délégués

Pendant le travail en sous-commissions, les coach évitent de visiter une équipe pendant plus de trois minutes d’affilée et jamais plus d’un coach dans une même équipe à la fois.  Chaque coach fait un tour rapide de toutes les équipe au début, au milieu et à la fin du temps imparti afin de se faire une idée intuitive de la qualité de leur travail.  Les coachs évitent aussi de montrer un quelconque intérêt pour le contenu du travail des sous-groupes.

Le PDG évite de visiter les équipes y compris son comité de direction.  Un des coachs l’accompagne en travail de coaching à deux pendant le temps de cette séquence afin de l’aider à prendre du recul, formaliser ses impressions concernant le procesus en cours et mieux comprendre la complexité de son organisation.

Notes: 

  • Le lancement des travaux en sous-commissions met en oeuvre une deuxième modification systémique de l’architecture du processus de coaching d’organisation.  Alors que l’architecture précédente en plénière pouvait laisser croire à une séquence d’échange entre départements et avec le comité de direction, voilà que toutes les équipes sont amenées à travailler seules, sur des missions spécifiques, au sein d’espaces relativement privés.  Cette deuxième modification géographique permit un autre recentrage de l’énergie de chacun.
  • Chaque équipe devait formuler ses perceptions sur elle même et sur les autres en l’absence d’un regard hiérarchique, et qui plus est, en l’absence des coachs.  Cela élimine le regard d’un public plus large, limite les stratégies de communication indirectes, sociales ou politiques, et met en scène la possibilité de confrontations plus personnelles au sein de systèmes beaucoup plus restreints.  
  • La dimension privée du travail en sous-commissions dans des salles distinctes donne à chaque équipe les moyens de se responsabiliser sur son propre travail, ses propres processus et ses propres résultats.  Cela permet un recentrage pratique par chaque équipe sur elle-même, à distance du système plus large.
  • Au sein du comité de direction, chaque responsable de département se retrouve à la fois en position de s’entendre dire ce que son propre département devait faire pour mieux participer aux résultats de l’entreprise, et en position de donner son avis sur les autres départements.  Cette opportunité de confrontation collective entre les membres du comité de direction et en l’absence du PDG, permet de nouvelles perspectives sur le travail qu’ils ont encore à faire entre eux.

Les sous-commissions travaillent de façon intensive jusqu’à l’heure avancée du repas prévu pour 14 :00 heures.

Pour évaluer vos compétences actives de coach (comportements) et avoir de nouvelles options, essayez le questionnaire proposé sur ce site:

Deuxième Session Plénière

Après le repas, tous se retrouvent à nouveau en session plénière, dans la même configuration.  Chaque participant est assis au sein de son équipe, elle-même face au centre vide de la salle.  Le PDG garde sa place assis seul de son côté, un peu en retrait du cercle d’équipes transversales.

Il est demandé à chaque équipe de plier la feuille de recommandations concernant chacune des autres équipes et de la lui livrer.  Il leur est aussi demandé de garder la feuille qui concerne leurs propres recommandations à eux-mêmes.

A la surprise générale et au risque de provoquer une certaine frustration, les coachs demandent immédiatement à toutes les équipes de mettre de côté les feuilles qu’elles viennent de recevoir, sans les lire.  Il est précisé que le travail sur ces listes ne concerne point l’assistance mais se fera par la suite au sein des départements concernés.

  • Note: En toute logique, les participants s’attendent à immédiatement présenter voire à discuter en grand groupe le résultat de leurs travaux en sous commission.  Certains participants qui espèrent encore assister à une confrontation générale et dramatique sont à nouveau déjoués par cette stratégie.  D’autres, qui souhaitent avoir l’occasion de pointer du doigt les lacunes des autres départements ou de l’ensemble du système doivent encore ronger leur frein.

Les coachs expliquent l’évidence : c’est à chacune des équipes présentes de travailler en interne sur ses limites et sur son potentiel à développer.  La perception des uns et des autres fournie par les listes de recommandations est certes très utile pour chaque équipe.  Toutefois cela ne change pas que c’est surtout à chaque équipe de se fixer ses propres objectifs et d’avancer sur ses propres chantiers.

En lieu et place d’échanger sur le contenu des travaux en sous groupes, les coachs proposent à chaque équipe de partager leurs perceptions sur leurs propres processus internes de travail : Partagez comment s’est passé la forme de votre réunion en sous groupe, mais sans mentionner le contenu de votre travail.

La différence entre le processus de travail et le contenu des réunions n’est pas immédiatement compris par tous les participants.  Cette différence est clarifiée :  « A supposer que la réunion ait eue pour contenu un sujet totalement différent, que pouvez vous dire sur sa forme, ou sur votre façon de travailler ensemble en réunion ? »

Equipe après équipe, chacun des membres présente et puis discute avec ses co-équipiers le « comment » de leur travaux ensemble.  Pendant chaque présentation collective d’une équipe, les autres équipes écoutent, mais ne peuvent intervenir.  Seuls les coachs posent des questions de clarification et d’approfondissement après que chaque équipe ait eu au moins dix minutes de temps pour s’exprimer par elle même.

Pour illustration suivent quelques exemples de questions posés par divers coachs à des équipes différentes.

  • Quels étaient les participants les plus centraux ? Lesquels étaient les plus périphériques ?  Lesquels étaient les plus centrés sur la production et les résultats ?  Lesquels prenaient le plus de temps pour préciser les propositions et oeuvraient pour aboutir à des formulations exactes ? Lesquels étaient les plus passionnés ?  Lesquels étaient les plus factuels ? Qui était le plus facilitant, gardant une certaine distance avec le contenu ? Lesquels ont manifesté des oppositions ?  Lesquels ont manifesté des coalitions ? Lesquels jouait un rôle de temporisateur ou de médiateur ?  Comment ont fonctionné les rôles désignés pour faciliter le processus du groupe ? Comment ces rôles peuvent-ils s’améliorer par la suite, lors de vos prochaines réunions ? Que pensez vous pouvoir retenir pour améliorer vos réunions d’équipe en général ? Etc.

Les questions des coachs sont posées par différent coachs sans que leur ordre d’intervention ne suive une quelconque structure, et les questions posées aux différent groupes ne se ressemblent pas.

Notes :  

  •  L’objectif de cette forme d’exploitation relativement souple et informelle sinon imprévisible a pour but d’éviter un processus plus formel ou rituel.  Il propose à chaque équipe une différentiation et permet l’émergence d’inspirations liées aux relations qui s’instaurent dans l’instant présent.
  • De façon systémique, la circularité stratégique dans la communication des coachs illustre au client collectif ce qu'est la circularité dans la communication et le forme à la puissance d'une collaboration efficace menée par des acteurs paritaires.

Le « débriefing » des processus de travail en sous-groupes dure plus de deux heures et devient peu à peu une pièce centrale du travail en session plénière.  Au fur et à mesure que chaque équipe prend son tour, les participants partagent plus de détails et émettent des commentaires plus pertinents.  Chaque équipe prend presque plaisir à décrire la spécificité de ses processus et de sa culture au reste de l’organisation.

Notes:

  • Ces formulations en public de processus spécifiques à chacune des équipes révèlent peu à peu des caractéristiques fondamentales et des cultures et modes opératoires différenciant chacun des sous-ensemble.  
  • Cette révélation est à la fois au bénéfice de l’assistance et à celui de l’équipe concernée, qui peu à peu prend conscience de sa spécificité et de sa différence par rapport aux autres.
  • Même si cette séquence a lieu au regard du reste de l’organisation, les questions des coachs ne cherchent qu’à accompagner chaque équipe dans sa prise de conscience de ses propres processus internes.  C’est pour répondre à cet objectif que les interventions des autres équipes sont volontairement limitées par les coachs,  dans un premier temps.

Quelques questions de coachs sont centrées sur les corrélations systémiques entre les processus internes de chaque équipe lors de son travail en sous-commission et l’observation de ses interactions alors qu’elle présente son travail en session plénière.

Exemples :

  • Si, lors de la session plénière, une seule personne expose l’ensemble des processus d’une équipe pendant que les autres membres l’écoutent attentivement mais de façon passive, en quoi cela reflète leur façon de travailler en sous-commission ?
  • Si les membres d’une équipe s’interrompent tous activement pendant une présentation collective chaotique, en quoi cela reflète leur façon habituelle de travailler ensemble ?
  • Si deux personnes restent silencieuses, assises à la périphérie de la présentation d’une équipe, en quoi cela peut illustrer leur positionnement quotidien au sein de ce sous-système ?
  • Si seuls deux ou trois ténors cherchent à imposer une perception positive au dépend des autres plus critiques, en quoi cela reflète la qualité des résultats de leurs travaux collectifs ?
  • Si l’ensemble de l’équipe se retient de façon attentiste et ne fait que répondre de façon minimaliste aux questions des coachs, quel parallèle les membres peuvent-ils faire avec leur travail en sous-commission?
  • Si deux participants expriment avec passion leur désaccord devant le grand groupe, comment ont-ils structuré, de la même façon, le processus de leur équipe en sous-commission ?
  • Si une équipe présente son travail avec méthode, ou avec passion, ou avec parcimonie ou dans un excès de détails, etc. quel est le reflet avec sa façon habituelle de travailler ?
  • etc.

Quel que soit le résultat de ce travail de partage centré sur des parallèles systémiques, les questions de conclusions des coachs se tournent vers l’avenir :

  • Que décidez-vous de faire de différent dans votre prochaine réunion de sous-commission, et dans vos futures réunions d’équipe pour que tous puissent mieux participer afin d'obtenir des résultats collectifs plus performants ?

Lors du travail de présentation de chaque équipe et lors des questions et réponses de chaque coach, les autres participants dans la salle écoutent, et n’interviennent pas.  Ce n’est qu’après qu’une équipe a terminé son travail avec les coachs que des questions complémentaires sont acceptées de la part des autre participants à la réunion plénière et de la part du PDG.

Notes :

  • La présentation par chaque département de ses processus internes lors de sa présentation en grand groupe fournit de nombreux indicateurs ssytémiques sur ses processus en sous-commission comme sur ses processus de travail habituels, au sein de l’entreprise.  De fait, cette séquence donne au reste de l’organisation de nombreux indicateurs, in situ de la qualité des interfaces internes de l’équipe et des spécificités de sa culture propre.
  • Sachant que les membres du comité de direction, tous directeurs de départements ne peut intervenir lorsque leur équipe se présente, chacun d’entre eux se trouve en position à la fois d’observer à distance les processus de son équipe, et de ne pas pouvoir intervenir pour les préciser ou les justifier.
  • Les membres du comité de direction présentent aussi au reste de l’organisation leur perception de leur propres processus tout en les mettant en œuvre in situ, au sein de la session plénière.  Eux aussi modélisent qu’une équipe peut se centrer sur son potentiel et se fixer des objectifs d’amélioration dans l’avenir.
  • Le PDG est en position de voir toute la complexité culturelle de son organisation mise à plat devant lui.  Cela lui permet de développer une distance stratégique vitale.
  • Chaque équipe apprend peu à peu à méta-communiquer sur ses processus internes et sur des options de solutions.
  • Tous les participants ont l’opportunité de constater l’importance de développer des processus internes plus performants et centrés sur des résultats collectifs. Ils obtiennent aussi de nombreuses pistes d’amélioration qu’ils peuvent mettre en œuvre au sein de leur équipe par la suite.

Deuxièmes Consignes

Dès la fin des présentations des processus internes des équipes, les coachs leur demande de produire de nouveaux volontaires pour assumer les trois rôles fonctionnels pour leur prochaine réunion en sous-commission : faciliteur, cadenceur, et scribe au tableau-papier.  Les volontaires reçoivent de nouvelles feuilles descriptives de leurs rôles, à lire aux autres participants dès leur arrivée dans leurs salles de sous-commissions.  Le scribe est à nouveau sollicité pour relever avec précision les consignes pour ce travail ultérieur.

Au sein de chaque équipe dont le comité de direction, la consigne pour les prochains travaux en sous commission est la suivante :  Emportez toutes les listes de recommandation vous concernant, issus des autres équipes, plus la liste que vous avez composé sur vos propres axes de développement.  En partant de ces listes :

  • Faites d’abord un report sur une seule liste de tous les items qui figurent sur toutes les listes, sans effectuer aucune censure ni aucune synthèse.
  • Effectuez ensuite un choix de dix priorités que vous estimez peuvent faire une différence significative dans votre contribution aux résultats de l’entreprise.
  • Pour chacune de ces priorités, établissez des objectifs mesurables, des instruments de mesure et des délais dans lesquels vous vous engagez à obtenir des résultats.
  • N’hésitez pas à construire des plans d’action précis dont les résultats seront mesurables.

Feuilles de décision

Chaque équipe est invitée à relever ses listes de priorités, ses objectifs, ses délais et ses plans d’actions sur des feuilles de décision pré imprimées dont le format permet des photocopies.  A la fin de ce travail en sous commission, une copie des feuilles de décisions de chaque équipe sera photocopiée pour être distribuée à tous ses membres comme aux membres du comité de direction et au PDG.

Les feuilles de décision pré imprimées comprennent une colonne vide pour inscrire les délais de chaque décision et une autre pour inscrire le nom du pilote qui assurera le suivi de la décision.  Il est souligné que les pilotes ne peuvent être que des personnes présentes à la réunion de sous commission.  Il est aussi annoncé que la qualité du remplissage des feuille de décisions est généralement considérée comme un des indicateurs principaux de l’efficacité d’une réunion.

Enfin les coachs sollicitent un quatrième volontaire par équipe à même d’assurer le rôle de « secrétaire » de réunion (pousse décision).  Ce rôle est différent de celui de scribe. Il consiste à aider l’équipe à se centrer sur sa production de décisions complètes et inscrites sur la feuille de décision.  La fonction des volontaires est de s’assurer que les décisions sont concrètes, claires, mesurables, et qu’elles ont toutes leur délai d’application et leur pilote choisi parmi les membres de l’équipe présents à la réunion.

Quelques participants proposent que les photocopies de chaque groupe soient distribuées à chacun des soixante-dix présents dans la salle.  Cette proposition est acceptée.

Un temps est négocié pour assurer ce travail relativement conséquent en sous-commission.  Le temps est alloué de façon à ce que le travail en sous-commission termine la journée et démarre la matinée de la suivante.  Par conséquent, la session plénière est ajournée en se donnant un rendez-vous collectif, en salle plénière et dans la même configuration, au milieu de la matinée du deuxième jour.

Notes :

  • Le fait de laisser les participants finir la journée et démarrer la suivante au sein de leurs équipes plutôt qu’en session plénière est une façon systémique de leur déléguer encore plus de liberté et de responsabilité.  Cette segmentation du temps de travail du coaching d’organisations n’est pas anodine.  Au delà du jeu des modifications de l’architecture de l’espace, elle ajoute un autre indicateur symbolique et plus inhabituel : le processus de délégation de la responsabilité aux équipes subalternes se fait aussi en jouant sur la segmentation du temps.
  • Par conséquent, la session plénière prend moins d’importance relative au sein du déroulement des deux jours.  Si elle lance la première journée, elle ne la clos pas ni ne démarre la deuxième.  Cela renforce la perception des participants que le processus et la responsabilité de résultats est réellement mis entre leurs mains.  La session plénière n’est progressivement devenue qu’un lieu occasionnel où le travail en sous commission est organisé, sans plus.
  • Chaque équipe est sollicitée pour définir ses propres priorités, objectifs, plans d’action et délais hors de la présence de leurs chefs de département.  Cela accentue encore plus la marge d’autonomie et de responsabilité des membres des équipes et de leur travail en transversalité.
  • Il faut cependant souligner que dans la mesure où les responsables de département ne participent pas aux réunions de leurs équipes, les propositions de décisions qui figurent sur les feuilles de décisions ne pourront être considérées comme fermes et définitives.  Le processus ne fait que mettre les membres de chaque équipe en situation d’oeuvrer ensemble pour proposer les options de décisions qu’ils considèrent stratégiques.
  • De même, le comité de direction œuvre hors de la présence du PDG.  Ses membres sont mis en situation collective de proposer des axes de développement en se centrant sur leur perception collective des priorités de l’entreprise toute entière.  Ces propositions de décisions seront données au PDG avant que ce dernier ne les influencent avec ses propres priorités.  Ce travail consiste à aspirer les responsables de département au niveau supérieur, en les centrant sur les résultats de l’entreprise toute entière, hors des préoccupations limitées de leurs silos individuels.
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LE DEUXIEME JOUR

Le Processus
 
Lors du travail en sous commissions, les coachs évitent à nouveau de visiter les groupes trop souvent ni trop longtemps.  Ils ne font que passer rapidement dans chaque équipe pour sentir le type de dynamique, et surtout sans prêter attention au contenu de leur travail. 

Le PDG ne visite aucune des équipes.  Il est accompagné par un des coachs pendant la plus grande partie du temps de travail.  Avec ce coach, il met à plat sa perception de la culture de son entreprise et réfléchit aux questions du coach qui le guide dans sa réflexion sur le management de son organisation, sur son comité de direction, sur la stratégie de développement de son organisation, etc..  

A la fin du temps imparti pour le travail en sous-commission, chaque équipe photocopie sa feuille de décision en autant d’exemplaire que le nombre de participants à l’événement. Des documents sont distribués dès l’ouverture de la troisième session plénière, après la pause en milieu de matinée.

Il est demandé à tos les participants de ranger les feuilles de décisions pour lecture ultérieure, et souligné que ces décisions ne sont pas encore formellement prises.  En effet, pour être officiellement actées, ces décisions doivent encore être validées par les décisionnaires, jusque là absents des groupes transversaux.  Les coachs annoncent que ce travail sera fait en équipes et avec les décisionnaires, suite à la session plénière.

Troisième session plénière

La troisième session plénière ressemble à la seconde.  Son déroulement est centré tour à tour sur le partage des processus de fonctionnement de chacune des équipes.  Les échanges sont plus spontanés.  Chaque participant partage plus volontiers sa perception.  Les participants sont familiers avec le processus et décrivent avec plus de facilité les détails pertinents de leur travail en équipe.

De façon générale, ce tour d’échanges témoigne d’un meilleur travail en équipe, illustré en directe par une meilleure qualité de présentation et d’écoute dans la salle.  Ce constat est validé par un résultat centré sur des actions et solutions plus pratiques.  De plus, les participants manifestent spontanément une bien plus grande satisfaction.  Quelques-uns mentionnent des passages difficiles que l’équipe à réussi à surmonter grâce à l’intervention salutaire de l’un d’entre eux qui réussit à les remettre sur la bonne voie et les rendre plus productifs.

  • Les questions des coachs sont centrées sur le détail des processus, sur les progrès constatés par rapport aux sessions précédentes et sur les enseignements que les participants peuvent tirer de ces comparaisons. 
  • Plus de temps est accordé pour préciser les compétences utiles des divers rôles d’accompagnement de réunions performantes et sur les moyens que chaque équipe peut mettre en œuvre afin de mener de meilleures réunions dans l’avenir.  
  • Les coachs posent des questions spécifiques pour révéler l’intérêt de faire tourner les rôles de réunion afin de développer un environnement de co-apprentissage et de co-développement au sein des équipes.

Cette deuxième réunion plénière dure jusqu’à l’heure du repas de midi.

Troisièmes consignes

L’après midi, une troisième et dernière session de sous-commissions est organisée.  Chaque équipe départementale est invitée à se réunir à nouveau, mais cette fois-ci avec son responsable de département.  Par conséquent, le comité de direction ne peut se réunir, faute de participants.

Au sein de chaque département, les mêmes rôles de réunion (moins le scribe) sont assumés par d’autres volontaires encore.  Les responsables de départements, décisionnaires officiels, sont invité à assumer aucun des rôles qui sont de fait encore délégués aux autres membres des équipes.  Les coachs expliquent que cela permet aux décisionnaires de se centrer sur la qualité des décisions, de garder le recul nécessaire pour bien observer chacun son équipe et en général pour développer un regard plus stratégique. 

Au niveau du contenu, l’objectif de cette dernière session de sous-commission est de finaliser et formaliser les décisions et plans d’actions de chaque département.  Ces formalisations seront matérialisées par des feuilles de décisions qui seront ensuite distribuées :

  • A chaque participant de la réunion.
  • A chaque membre des autres départements présent lors des deux jours, par e-mail, le lendemain.
  • Dont à chaque membre du comité de direction.
  • Et au PDG

De façon plus précise, la question pour chaque équipe est «  Que va faire votre département pour contribuer de façon significative à l’augmentation de la qualité perçue et des résultats financiers de l’organisation dans les six mois qui suivent ? »  Pour chaque décision, notez les instruments de mesure, les pilotes et les délais. 

  • Note : Pour pouvoir officiellement prendre ces décisions au sein de chaque département, l’architecture des équipes départementales devait être modifiée pour inclure les responsables de départements en tant que décisionnaires.

Au niveau de la forme, l'effet systémique de ce dernier travail en sous commission est par conséquent de réintégrer les responsables de départements au sein de leurs zones de responsablilités et de leur rôle de décisionnaire.  Celà permet de les requalifier dans leur fonction de responsables.

Puisque les responsables de départements ne peuvent se réunir au sein du comité de direction avec le PDG pour prendre les décisions à ce niveau, ce comité s’engage à se réunir dans la semaine qui suit afin de finaliser leurs décisions.  Par ailleurs, ils s’engagent à envoyer aux soixante-dix participants le relevé de leurs décision par email, dans un délai de huit jours.

Pendant cette dernière séquence, les coachs évitent totalement de rendre visite aux différentes équipes en sous-commission.   Les coachs et le PDG se réunissent de leur côté pour ensemble faire le bilan des deux jours et envisager des options de suivi pour l’avenir.

Quatrième Session Plénière

La dernière session plénière est sensiblement modifiée pour refléter la configuration systémique du travail en sous-commission qui vient d’avoir lieu.  Chaque département est positionné dans la salle avec son responsable, la place du comité de direction est laissée vacante.

Dans cette nouvelle configuration, chaque département présente au reste du groupe leurs processus de travail, toujours en évitant de parler du contenu de leurs discussions et décisions.

Les questions de coachs les accompagnent en centrant aussi l’exposé des équipes sur l’intégration de leurs responsables et la différence perçue entre ce travail en sous-commission et les expériences précédentes.  Aussi, des questions sont posées aux responsables de départements pour éliciter leurs perceptions des éventuels changement qu’ils ont perçu dans la conduite de réunion de leur équipe, comparée au réunions effectuées dans le passé.

Une discussion suit pour souligner l’intérêt de continuer à mener les réunions départementales habituelles de cette même façon, avec les mêmes rôles délégués, assumés en rotation régulière par tous les membres de chaque équipe.  Une décision dans ce sens semble presque unanime.

Cette discussion libre en session plénière amorça plusieurs autres discussion, décisions et engagements.

  • Le comité de direction s’engage à suivre tous les engagements de toutes les équipes et à en informer tous les départements à un rythme mensuel.
  • Le principe d’une autre action à soixante-dix participants ou plus, à un rythme annuel est discuté et acté.
  • Le PDG fait une courte conclusion remerciant tout le monde pour leur fort engagement dans l’avenir et la réussite de la société, et  s’engage personnellement dans ce sens.

 Un cocktail de clôture accueille tout le monde avant le départ.

  • Note :  Sur la fin de la dernière session plénière, les coachs se sont rendus de plus en plus transparents, se regroupant dans un coin de la salle et laissant le groupe à lui même.  Celui-ci se mit à évoluer dans sa propre intimité, et chose nouvelle, prendre des décisions en grand groupe sans difficulté aucune.  La frontière entre les départements s’est estompée et une nouvelle architecture d’interfaces a pris forme comprenant les soixante-dix personnes oeuvrant toutes dans une même direction.

Conclusions

Une série d’observations peuvent être faites et quelques conclusions peuvent être tirées sur le coaching systémique d’organisations à partir de ce cas.

Le processus d’accompagnement illustré n’est aucunement centré sur le contenu, mais entièrement sur le processus.  A aucun moment les coachs n’ont proposé de commentaires ou d’analyses sur la situation de l’entreprise, sur un de ses enjeux voire sur une quelconque solution.

A aucun moment le processus d’accompagnement illustré par ce cas n’a été centré sur l’amélioration de relations interpersonnelles ou interdépartementales précises.   De fait, à aucun moment, l’attention des coachs n’a été centrée sur des individus particuliers.  Par ailleurs, ils ont tout fait pour se rendre eux-mêmes le plus transparents possible et  pour laisser tout l’espace  au travail du client collectif.

Le travail des coachs concernait presque exclusivement la création d’un espace pertinent et mobile d’apprentissage et de développement systémique pour permettre à l'organisation, et par conséquent à tous ses membres, de trouver ses propres solutions.  Si enjeux relationnels il y avait, ceux-ci furent traités par les équipes et les personnes concernées, à leur rythme et à leur façon.

Lors de cet accompagnement, les enjeux de l’organisation furent directement adressés par les employés et dirigeants.  Ce travail a été intentionnellement dirigé par les questions des coachs centrées sur l’avenir, sur les objectifs, sur les solutions et sur les plans d’actions centrés sur des résultats.

Toutes les sessions en sous-commission ont été menées par les membres des équipes concernées.  Au fur et à mesure du déroulement des deux jours, les visites des coachs dans ces sessions étaient de plus en plus espacées et de plus en plus courtes.  Par conséquent, le résultat des travaux n’est aucunement attribuable à leur présence ni à leur volonté d’aboutir.  Par conséquent aussi, les résultats des discussions et toutes les décisions prises lors de ces deux jours appartiennent totalement aux participants.  De plus, avec quelques techniques simples et sans supervision des coachs, les équipes ont expérimenté, adapté et intégré des moyens de mieux mener leurs réunions en entreprise par la suite.

Les sessions plénières étaient menées avec un objectif systémique à la fois centrées  sur ce que les participants disaient que leurs équipes avaient fait et sur la façon dont ils présentaient ce message en plénière.  Dans cette arène, les questions des coachs proposées à chaque équipe avaient pour objectif d’en aider les membres à mieux comprendre leurs processus de travail internes et à en imaginer de plus performants. 

Ce travail par équipe peut ressembler à un accompagnement d’équipes, mais le fait qu’il soit fait en partage en grand groupe, au vu des membres du comité de direction et avec le PDG permet de toucher une autre dimension collective bien plus large.

Perspectives

De toute évidence, de multiples enseignements peuvent être tirés et autant de questions méritent d’être posées à partir de ce cas sur le coaching systémique d’organisation. 

Une première série de questions peuvent être posées sur l’art du changement de perspectives du client par la modification de ses interfaces de travail. Par exemple quelles architectures d’apprentissage sont particulièrement utiles pour quels types d’objectifs ? 

Le cas ci-dessus est particulier, mais quid d’une situation concernant deux organisations en cours de fusion,

  • ou encore quid d’un travail beaucoup plus centré sur l’augmentation des bénéfices,
  • ou concernant le déménagement d’un siège social,
  • ou en cas de réorganisation par ligne de produit plutôt que par zone géographique,
  • etc. ? 

Il est certain qu’à chaque cas particulier et chaque enjeu d’organisation spécifique, le jeu de reconfiguration systémique des architectures d’apprentissage mérite d’être conçu de façon originale.

Une autre série de réflexions mérite d’être élaborée sur les stratégies systémiques illustrées au cours de ce cas.  Prenons pour premier exemple la stratégie de triangulation présente tout au long de l‘accompagnement décrit ci-dessus. Elle a consisté à presque continuellement centrer toutes les personnes et équipes sur des objectifs communs pour les décentrer de leur polarité relationnelle verticale, initialement perçue et présentée comme conflictuelle. 

Alors qu’ils étaient en opposition manifeste à leur arrivée et grâce à ce travail de recentrage collectif, l’ensemble des acteurs en présence a pu conclure les deux jours en regardant tous dans le même sens.  Cette stratégie centrale dans une démarche de coaching systémique d’organisation la différencie nettement de tout travail issu des héritages psychologiques et du mouvement du potentiel humain.

Bien entendu, au delà de l’accent mis sur les modifications d’architectures de travail tout au long de cet exposé, un certain nombre d’autres axes de réflexions sur le coaching d’organisations sont possibles. 

Prenons pour exemple : Comment peut évoluer l’art de poser des questions pertinentes lorsque l’on accompagne un travail au sein de très grands groupes ?  Quelles sont les stratégies collectives qu’une équipe de coachs d'organisation peut inventer et mettre en œuvre que le coaching individuel ou d‘équipe n’a pas encore eu l’opportunité d’explorer ?  Etc.

Ces questions font l’objet du vaste champs du coaching d'organisations qui reste encore à explorer.

Alain Cardon, copyright Métasystème EURL.  Juillet 2008
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